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Le Blogue de Manuel Ruiz
14 novembre 2019

Le sel de la mer - Edouard Peisson - Grasset - 1954

9782246154525-T

Un roman d’Édouard Peisson, publié chez Grasset en 1954.

THÈME : Le capitaine de marine Joseph Godde se présente à l’Inscription Maritime de Marseille. Il doit passer devant une commission d’enquête. En effet, quelques mois plus tôt, il était le commandant du CANOPE, un paquebot qui a sombré dans l’Atlantique Nord, avec des centaines de passagers. Godde est interrogé. Il raconte comment il s’est retrouvé au commandement, à la suite du brusque décès du commandant précédent. Et comment il a été conduit à prendre une décision tragique. En pleine tempête, il a dérouté le paquebot pour porter secours à un cargo en péril. Noble attitude qui a mené à des conséquences terribles. Telle est du moins l’explication qu’il donne au désastre. Mais l’enquêteur Larouche, impitoyable, pointe les incohérences de son récit. Le doute s’installe alors. Le capitaine Godde a-t-il menti ? La vérité serait-elle plus trouble ? Que s’est-il réellement passé sur le CANOPE ?

MON AVIS : Le meilleur moyen d’être démodé, c’est d’être démodé. Je veux dire de l’être vraiment. Alors, allons-y gaiement. Nous serons démodés, car le bouquin dont nous parlons ici appartient à un genre aujourd’hui désuet : le roman maritime. Il fut pourtant florissant, car il existe un malentendu, créé par les Français eux-mêmes : celui qui prétend que la France n’est pas un pays de marins. Eh bien, si. On aime la mer, et on aime les romans sur la mer. À l’époque, on en publiait en quantité. Celui-ci fait partie du nombre.

Il est signé Édouard Peisson, maintenant anonyme. Plus personne ne le connaît. Englouti par l’océan du temps. À quoi bon essayer de rappeler qu’il pondit pas mal de bouquins sur la marine ? Tout le monde s’en fout. Pour le peu que je sais de lui, il semble qu’il n’ait réellement été marin que pendant quelques années. Ensuite, il gagna sa vie dans un bureau de l’Inscription Maritime de Marseille. Bah, il écrivait des beaux livres sur la mer, et c’est tout ce qui compte. Faut-il rappeler qu’aucun écrivain de science-fiction n’a encore posé le pied sur Mars ?

Alors, ce roman est maritime, et raconte une histoire de bateaux. Un seul mot : PASSIONNANT. Dès les premières pages, on est happé, comme le naufragé par une vague puissante, et ballotté, et emporté. Quand on entend décrire « les rouleaux qui franchissent les pavois et inondent le pont », on y est, on sent l’eau qui nous dégouline dessus, on est saisi, on est effrayé. Et tout le livre nous tient ainsi en haleine. On s’accroche, en se demandant comment tout cela va s’achever. On veut le savoir. Passionnant, vous dis-je. Si les autres œuvres de Peisson sont au même niveau, il faudrait bien parler d’un des grands écrivains francophones du XX° siècle.

Parce que lire Peisson est à la marine ce que lire Saint-Exupéry est à l’aviation : on y apprend des tas de choses. Par exemple, on découvre la hiérarchie, complexe, de la compagnie transatlantique de l’époque : directeur d’escale, directeur de l’armement, directeur de la compagnie, etc. Et ceci étant conséquence de cela, on découvre aussi les trucs, parfois fumeux, employés par les marins pour obtenir le matériel (fer ou charbon) nécessaire à la traversée de l’océan. Naturellement, en voyant les belles affiches de réclame, on ne pouvait pas le deviner. Et seul quelqu’un ayant véritablement vécu cette période pouvait le raconter.

En atteignant la fin, on ne sait toujours pas si Godde est coupable ou innocent, à féliciter ou à blâmer, mais on a eu la démonstration que Peisson était un sacrément bon écrivain. Oublié ? Bien dommage.

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  • Manuel Ruiz, écrivain, scénariste, producteur de radio. Manuel Ruiz est membre de la Société des Gens de Lettres et de la Société des Auteurs et Compositeurs Dramatiques. Validation de formation à la SGDL le 08/10/2018.
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