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Le Blogue de Manuel Ruiz
31 octobre 2010

Fallait pas commencer (Vengeance is mine) - Mickey Spillane - Le Livre de Poche - 1976

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L’édition chroniquée ici date de 1976, mais le livre fut édité en 1950.

THÈME : En 1950, à New York, le détective privé Mike Hammer est dans de sales draps. Il vient de se réveiller avec un cadavre à côté de lui. Et ce dernier s’est suicidé avec son revolver. Le voilà privé de sa licence et réduit au chômage. Pour pouvoir rouvrir son agence, il n’a qu’une solution : mener sa propre enquête et résoudre cette énigme. Très vite, il acquiert la conviction que l’homme ne s’est pas suicidé. Ses recherches l’amènent dans une agence de publicité dirigée par la belle et mystérieuse Junon Reeves. Mais qui est réellement cette Junon et quel est son rôle ? Mike Hammer ne peut compter que sur l’aide de son ami, le policier Pat Chambers, et de la jolie top model Connie Wales. Un peu léger pour faire face à tous les coups de feu qui le visent.

« Vengeance is mine » est mon Spillane préféré. Même s’il n’est pas, à proprement parler, le meilleur. Mais c’est probablement celui qui illustre le mieux la méthode Spillane. C’est aussi un des plus originaux de cet auteur. Il nous plonge dans un New York sous la neige, et il présente une situation cocasse : le détective étant privé de sa licence, c’est la secrétaire qui devient la patronne !

Ce me fascine le plus chez Spillane, c’est sa maîtrise totale du rythme. L’auteur irlando-américain est peut-être le plus fort dans cet exercice. Il nous présente des scènes très lentes et, brusquement, il accélère l’action, alignant les rebondissements, avant de ralentir à nouveau pour permettre au lecteur de reprendre son souffle. Avouons-le, on est saisi, happé, harponné. Quand on commence un Spillane, on reste scotché jusqu’au bout, jusqu’au dénouement qui tombe presque toujours à la dernière phrase. C’est le cas ici, où il faut aller jusqu’à la dernière phrase pour savoir enfin qui était vraiment la mystérieuse Junon Reeves. Aucun doute : pour ça, Spillane est le meilleur. Il fut aussi le premier à jouer à fond la carte du sexe et de la violence sans se cacher, et les amateurs de ce genre sont servis avec lui.

On ne reviendra pas sur la mauvaise réputation de cet auteur, sauf pour dire qu’il fait ce qu’il faut pour la justifier : homophobie revendiquée, xénophobie visible, justification de la violence. La solution la plus simple serait de faire comme tant d’autres et jeter Mickey Spillane dans le sac infamant des « fachos ». Une autre solution, plus exigeante, serait de lire réellement ce qu’il écrit, pour s’apercevoir que l’écrivain new-yorkais est finalement très différent de l’image qu’on a fixée de lui. Dans ses livres, en tout cas celui-ci, il ne s’en prend pas aux minorités, mais à tout le monde. Flics, attorneys, patrons de boîte, hommes d’affaires : tous apparaissent comme des salopards ignobles. La société new-yorkaise entière est présentée comme décadente. Dès lors, le détective Mike Hammer ne fait plus figure de raciste ou de réactionnaire, mais de marginal. Il est marginal en Amérique, il le serait aussi dans n’importe quel autre pays.

Maintenant, inutile de me dire que Mickey Spillane, ce n’est pas de la grande littérature, car je m’en aperçois tout seul. Je crois que c’est John Steinbeck qui disait que « la pire littérature de gare était meilleure que Mickey Spillane ». Sans le savoir, il avait saisi le grand mérite de Spillane : ce type a réussi à captiver des millions de lecteurs avec une littérature qui, au départ, ne dépassait pas le niveau de la série Z. Comment faisait-il, c’était son secret.

 

 

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  • Manuel Ruiz, écrivain, scénariste, producteur de radio. Manuel Ruiz est membre de la Société des Gens de Lettres et de la Société des Auteurs et Compositeurs Dramatiques. Validation de formation à la SGDL le 08/10/2018.
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